Je ne suis pas née sportive, je l’ai déjà dit. J’étais de celles qui trouvaient tous les prétextes pour sécher le sport au lycée.
Et puis j’ai grandi. Enceinte de la Micro-Fille, je répétais en boucle à mon mari qu’après la naissance je me mettrai à courir. Il a ri.
En mai, soit 5 mois après l’arrivée de ma Micro-Bébé, on est allés claquer 80 euros chez Go Sport pour une tenue de running et des baskets. Au moment du choix de ces dernières, mon mari me dit « prends des baskets pour coureurs qui courent pas beaucoup », toujours en riant. Je lui ai dit non, j’ai pris des baskets pour coureur régulier.
Je ne sais pas d’où ça m’est venu, mais j’y croyais. J’admirais ma copine Running et Talons Hauts pour ses perf’, je me repassais en boucle dans la tête son article sur sa première course avant l’addiction. Tout moi. Pas sportive pour un sou, essoufflée en montant 2 étages… C’était pas gagné.
Et puis j’ai couru. 2 bornes. 10 minutes. J’étais au bout de ma vie.
Étrangement, là où j’aurai rapido lâché l’affaire auparavant (je suis assez du genre tout, tout de suite ou rien), j’ai continué. De 2, je suis passée à 5 km par sortie, puis à 10, frôlant les 15 parfois.
Le run, c’était un soir sur deux. Pas une contrainte non, un besoin.
Me vider la tête, me défouler, enfoncer mes écouteurs dans mes oreilles et oublier tout le reste. Compter les voitures, regarder ma montre, se dire « allez pousse encore un peu », sentir le froid cingler mon visage, le vent s’engouffrer sur mon t-shirt, écouter mon appli me donner mon temps, vouloir plus, plus vite, plus longtemps.
Se dépasser, se surpasser.
Le run, c’est rapidement devenu un mode de vie. Des sensations jusque là jamais rencontrées. Une fierté intérieure, un challenge perso, une communion silencieuse avec tous ces gens qui « courent après rien ».
J’avais pris mes petites habitudes, un petit 10 km chaque dimanche au bois de Vincennes.
Et puis il y a eu la hernie. Stop le sport, c’était il y a presque 8 mois déjà.
8 mois sans courir. Sans ressentir la chaleur du corps mêlée au froid du vent. Sans photo de montre à Instagramer. Sans cette adrénaline particulière de l’après. Sans cette douche salvatrice qui réchauffe et apaise. Sans ce souffle de vie, ce rien dans la tête, ce bonheur de se sentir vivant.
J’ai trouvé dans le sport ce que je n’avais jamais trouvé nulle part auparavant. Une sensation indescriptible, du bien, rien que du bien. Courir avec le sourire, courir après rien, courir avec soi.
Je me suis récemment fait opérer de cette fichue hernie. Je me sens libérée délivrée, comme dirait l’autre, avec les douleurs liées à la cicatrice en bonus gratuit.
Depuis, l’idée de rechausser mes baskets ne me quitte plus. J’en viens à détester ces gens que je vois courir, ces runners qui partagent leurs perf’ sur les réseaux sociaux. Je chialerai devant ma paire de baskets tellement l’envie d’aller courir, même juste un kilomètre me dévore de l’intérieur.
Un vide. Un trou béant.
Il me manque ce petit plus qui faisait de moi ce que j’étais vraiment. La cerise sur le gâteau de ma personnalité. Moi, sportive, runneuse, défiant la vie et ce passé amorphe, défiant les croyances, courant pour mon papa. Quelle fierté il aurait eu de voir sa fille enfin se bouger les fesses et aller fouler les sentiers côtiers bretons.
Le run, c’est aussi une thérapie. Une communion. Comme des retrouvailles indicibles dans le dépassement de soi.
Je suis dévorée par cette envie de reprendre, de courir à nouveau. Je sais que je vais repartir de zéro. Je flippe un peu des premiers temps pourris et des premiers kilomètres que je n’arriverai pas à dépasser. La reprise sera d’autant plus rude que j’ai fait la connerie de me remettre à fumer. N’importe quoi.
Une façon débile de combler ce manque, au fond. Je sais que le jour où je rechausserai les runnings, je pourrai balancer mon briquet.
Je me sentirai de nouveau vibrer, de nouveau vivre, de nouveau moi.
Z’avez pas une machine à accélérer le temps ?
Le médecin t’a dit au bout de combien de temps tu pourras te remettre à courir ?
J’ai lu quelque part qu’arrêter le sport crée un manque physique aussi. Courage !