Le premier enfant, qu’il soit unique ou à la tête d’une grande fratrie, a en lui le goût délicieux de la découverte, de l’apprentissage, de l’inconnu.
Grâce à la Maxi-Fille, je garde malgré mes trois enfants, l’impression d’être une primipare qui découvre chaque jour ce qu’est un enfant. Il y a dans la maternité, toutes ces choses que l’on connaît, ou du moins dont on se doute (au hasard, les couches à changer et les nuits pourries), et puis il y a le reste, la face cachée de l’iceberg, tout ce que l’on aurait jamais imaginé et que l’on découvre au fil du temps.
Je ne sais ce qu’il en est pour les autres parents, mais moi, je ne me suis jamais projetée avec mes enfants. Je les ai toujours savourés à l’instant T, sans jamais imaginer ce qu’ils deviendraient, comment ils grandiraient. A quel âge perdront-ils leur première dent, seront-ils bon élèves, aimeront-ils lire ou faire du sport ? Je crois qu’avant aujourd’hui, je n’avais jamais pris le temps d’y penser.
Aussi, je suis toujours étonnée, chaque fois que je les surprend en train de changer, grandir, évoluer, chaque fois que je me retrouve un matin à me dire que, mince alors, ces derniers temps l’un ou l’autre a fait un bond dans le temps. C’est toujours pareil, et je ne me lasse pas de cette sensation de « rencontrer » un peu plus mes enfants. Ces personnalités qui se dessinent, cette carapace de bébé qui s’ouvre puis tombe peu à peu pour laisser place à quelqu’un d’autre, un être à part entière, avec ses propres idées, ses avis et envies, ses goûts et préférences, son petit caractère et ses propres sensibilités.
La sensibilité, justement. Sûrement l’un des qualificatifs qui s’applique le mieux à ma Maxi-Fille, ma grande, mon aînée. Un caractère de feu mêlé à un cœur immense, une éponge à émotions, une petite fille qui ne fait rien à moitié, qui aime aussi fort qu’elle hurle ses mécontentements – et c’est dire si mes tympans ont souffert ces 5 dernières années -.
Elle m’a toujours fait fondre, cette sensibilité. Elle est l’une de ses forces, indéniablement. Même au plus profond de nos tourments, elle n’a jamais cessé de me câliner, de vouloir m’embrasser, de me couvrir de mots tendres et autres attentions. A m’en désarmer souvent, je l’avoue. Sans rancune aucune, une fois l’orage passé, elle se jette dans mes bras et me couvre de bisous. T’as ma maman d’amour, je t’aimerai toujours toute la vie.
Elle est comme ça. Attachiante, en somme. Dans tout, pour tout. Avec nous ses parents, mais aussi avec ses frère et sœur, et jusque dans ses amitiés. Pousser à bout, repousser les limites, chercher la petite bête, aller au clash et à l’opposition, pour mieux pleurer et s’excuser après. Je ne l’ai connue que comme ça, jusqu’à présent. Dans cette ambivalence déroutante qui nous oblige sans cesse à temporiser, rassurer, arbitrer, puis apaiser.
Jusqu’au week-end dernier où pour la première fois, j’ai vu ma fille calme et posée. Le week-end dernier, elle a rencontré un petit copain d’une année son cadet. Un week-end entre amis, 4 adultes et 4 enfants à la maison. La pluie à l’extérieur, un défi à relever. Je m’attendais à ce que tout coule tranquilou avec le Mini-Fils, pour dire vrai. Deux petits garçons d’âge à peu près équivalent, passionnés par les voitures et les camions de pompier, ça allait le faire, forcément.
J’envisageais plus difficilement la relation avec la grande, qui voudrait sûrement s’imposer et diriger comme elle le fait si souvent.
Autant dire que j’ai eu tout faux. Dès l’arrivée de nos amis, c’est avec la Maxi-Fille que le courant est passé. De suite. En une fraction de seconde, ils ont fait connaissance, sont partis jouer tous les deux… Et ne se sont plus jamais séparés.
Pendant près de 3 jours, ils ne sont jamais lâchés. Pas une seule dispute, pas un mot plus haut que l’autre. Pas de rapport de force comme il y en a systématiquement dès qu’un copain ou une copine vient jouer à la maison.
Du partage, des rires, des « moi je mange à côté de Louis » aux « moi je t’attends pour aller jouer », des « tu veux jouer à quoi » au lieu des habituels « viens on joue à ça, non mais moi c’est ça que JE VEUX ».
Sous nos regards d’adultes amusés s’est tissée tout au long du week-end, une belle complicité.
Il y a eu les « oh qu’elle est belle » et les « en plus Louis c’est mon copain et il est beau ». Il y a eu les « viens on joue à se marier« . Et puis les « de toute façon c’est mon amoureux ».
Il y a eu l’angoisse de la veille du départ, et les larmes du jour J.
Il y a depuis l’envoi de courrier, les petits échanges téléphoniques du soir et les bisous que l’on s’envoie en photo.
A 5 ans, je crois que ma Maxi-Fille vit ses premiers émois. Tout en douceur, naïvement, tendrement. Elle découvre l’attachement à un autre enfant, et la distance aussi. Elle met du cœur dans ses dessins, elle s’enquiert chaque jour de comment va son copain. Et tu lui diras que je l’oublie pas hein. Il a qu’à revenir à ma maison, dimanche prochain. Ou alors venir habiter près de chez moi.
Je ne m’y attendais pas, je l’avoue. Pas si tôt. J’étais jusque là habituée à voir mes enfants jouer autour d’autres enfants, ou avec eux, mais de loin. Je ne m’apercevais pas, que ma grande avant déjà 5 ans, et que ces émotions pouvaient déjà prendre une telle dimension.
Et pourtant, au fond, tout ça est tellement simple. Et aussi tellement innocent. Tellement beau.
Ce billet est tellement émouvant que les larmes me montent. L’enfance est un moment tellement beau. Ils se sont trouvés et pour eux c’est juste vrai