J’ai tout quitté. Mon mari, ma région, mon boulot, ma résidence secondaire et mon petit confort financier. J’ai explosé. Etouffé. Il fallait que je parte, maintenant. Il était temps.
Je le savais. Je le savais depuis longtemps. Fallait que ça s’arrête, c’était plus vivable, on n’était plus heureux tous les deux. Fallait que je parte, que je trace ma route, que je retrouve ma vie.
J’étais là sans être là. J’habitais une vie qui n’était pas la mienne et cette sensation d’étouffer sous le costume me bouffait chaque jour un peu plus.
Bien planquée sous mon masque, j’assurais les apparences. Mère épanouie, femme épanouie, famille qui va bien, collègue qui s’éclate.
Et puis j’ai implosé. Ces cinq dernières années ont été les plus fausses de ma vie. Emplies de doux moments avec mes enfants que je ne regrette pas, loin de là. Mais c’était juste pas moi.
Pas ma place, pas mon rôle, pas mes fringues, pas mon corps. Pas ma vie.
J’étais devenue une autre, celle qui court chaque jour après un idéal qu’elle a trouvé je ne sais où. Des os saillants parce que contrôler son corps c’est tout contrôler. Une reconnaissance de perfection au boulot parce que tu le vaux bien ma grande, tu peux bien gérer un truc comme une chef au moins.
Des sourires de facade sur les photos de Noël alors que juste avant, les mômes assistaient à une énième engueulade de leurs parents adorés.
Une garde robe qui déborde et une collection de pompes parce que quand t’es toute pimpée t’as l’impression d’exister.
Que du fake, des faux semblants. L’impression de ne pas être cette nana là sur les photos. Qu’elle est bien sympa, mais que je ne la reconnais pas.
Je n’ai pas un souvenir de famille en 5 ans qui ne soit pas empreint de fausseté.
Il y a des années qu’avec mon ex mari, on ne faisait plus que se crier dessus. Lever les yeux au ciel quand l’autre se permettait de parler.
Parfois il y avait un sursaut, une envie d’avoir envie. Pour les enfants vous savez. On peut pas leur faire ça, pas faire d’eux des gamins de parents séparés.
Cinq ans qu’à chaque nouvelle année, ma première pensée a été « cette fois c’est la dernière, le prochain nouvel an je serai plus ici ». Cinq ans sans bouger.
Jusqu’au jour où… Le confinement a été le déclic je crois.
A vrai dire j’en sais rien. Y’a eu un sursaut. Je me suis rendue compte que j’en avais ras le bol d’être la nana sur la photo. Ras le bol des contraintes, marre de toujours vouloir tout contrôler. Tout contrôler, c’était garder la main. Croire que j’étais là. Que c’était moi. Que j’habitais ce corps, cet endroit, cette vie là.
Ras le bol de me voiler la face. La véritable moi était ailleurs, loin.
Le véritable moi n’était pas sans défaut. Le véritable moi riait, s’amusait, ne contrôlait pas toujours tout. Le véritable moi était libre. Souriante pour de vrai. Imparfaite peut-être, mais heureuse malgré tout.
J’ai passé des années à marcher à côté de mes pompes, à passer à côté de moi. Je savais intérieurement que j’étais partie. Mais je restais malgré tout.
Parce que c’était moins compliqué. Moins de contraintes. Parce que c’était beau sur le papier. Parce qu’il y avait les enfants. Parce qu’après tout on a signé. Parce que peut être qu’un jour ça irait mieux. Parce que plein de raisons qui ne valaient rien.
En vrai, quand on s’aime plus, faut pas s’acharner. On n’a qu’une vie, faut pas la laisser passer. On peut être un couple sans être parents. On peut être des parents et ne plus être un couple.
Est-ce qu’on peut vraiment se payer le luxe de passer à côté de plusieurs années de vie pour des principes, pour un papier signé, pour une question de facilité ?
C’est dur de partir. Vraiment.
Beaucoup plus dur de partir que de rester. Rester, c’est rester dans son confort, aussi merdique soit-il. Rester dans une situation que l’on connaît et avec laquelle on a appris à composer même si elle ne nous épanouit pas.
Partir, c’est sauter dans le vide. Prendre un tournant sans savoir ce qu’il y aura après le virage. S’élancer sur une route vierge sans savoir où elle mène.
Partir c’est tout quitter. Abandonner un quotidien que l’on connaît, une situation stable pour l’inconnu le plus complet.
Partir c’est revivre. Reprendre sa vie en main. Redevenir soi.
Partir c’est se sauver. Au propre comme au figuré.

Wow, je tombe par hasard sur ton blog et je lis ce billet… une claque.
Bravo, mille bravos à toi. Ca doit être en effet super dur et il faut être sacrément costaud pour prendre conscience de tout ça et d’agir en conséquence. Je t’envoie tout plein de courage et je sais qu’une super nouvelle vie t’attend.
Grand grand merci pour tes mots <3
Tu as fait le plus dur.
Car il faut du courage pour quitter quelqu’un.
Période hyper difficile mais c’est pour moi une chance unique que nous donnons à nos enfants pour qu’ils soient épanouis au quotidien et heureux dans leur future vie d’adultes.
Pour avoir vécu une telle séparation il y a de nombreuses années maintenant, je suis persuadée que vous agissez là comme la meilleure des mamans…
Vous devez et devrez être très forte et positive pour que vos enfants en tirent le meilleur, être une maman plus héroïque encore et/mais il est certain que si vous parvenez à leur assurer un environnement positif et aimant, alors vous pourrez être fière de vos décision et vos enfants vous seront reconnaissants (à l’âge adulte certainement, adolescents peut-être pas car bien que nous les aimons et admirons inconditionnellement nos enfants se montrent parfois/souvent « ingrats »).
En vous lisant tout à fait pas hasard (j’habite Rennes et je recherchais des idées d’activités avec ma petite-fille auprès de blogs de mamans rennaises) j’ai été très émue… D’autant que j’ai vécu une expérience similaire lorsque mes enfants étaient petits.
Aujourd’hui mes enfants ont la trentaine et je peux dire avoir réussi (en puisant toute la force nécessaire (oh combien) dans l’amour que je leur portais) à les aider à devenir des adultes heureux. Il est évident pour moi que sans cette séparation ils n’auraient pu être si « équilibrés », ils n’auraient pas effectué d’aussi brillantes études, ils n’auraient pu recevoir leurs amis à la maison mais surtout ils m’auraient perçue comme une maman méchante (car extrêmement malheureuse).
En m’attachant lorsqu’ils étaient enfants et adolescents à ce que nos problèmes relationnels entre parents leur soient autant que possible imperceptibles, je pense avoir encouragé l’expression de leur amour pour leur papa (ils ne voyaient que le positif et je supportais seule le négatif), ce qui contribue à leur à équilibre.
À l’âge à adulte, petit à petit ils peuvent analyser, comprendre et approuver les décisions prises.
Mes deux enfants sont devenus des adultes équilibrés et heureux… et ils m’aiment plus encore…
Je vous souhaite de tout cœur de pouvoir construire avec vos enfants un environnement paisible et joyeux.
Je vous souhaite le meilleur !!!