Je suis mère depuis bientôt 10 ans maintenant. 10 ans que j’appartiens malgré moi à cette étrange communauté de celles que l’on appelle « les Mamans ».
Malgré moi parce qu’en décidant d’avoir un enfant, je n’avais pas de volonté particulière d’intégrer une quelconque communauté.
Et pourtant. Qu’on le souhaite ou non, on passe notre vie à intégrer des communautés.
Celle des écoliers, des lycéens puis des étudiants. Celle de l’entreprise, on intègre un collectif de collègues puis une profession. Plus officieusement, celle des passions qui nous animent, la communauté de sportifs ou de joueurs de Scrabble, la communauté des locataires ou des propriétaires, éventuellement une communauté religieuse ou la communauté de ceux qui n’ont pas de religion… Bref. Vous m’aurez compris.
Ce que j’appelle communautés, d’autres appelleront cela groupes ou team ou je ne sais quoi encore, peu importe le nom.
Mon sujet d’aujourd’hui, c’est donc la communauté des mamans. Des mères.
Celle-ci est particulière parce qu’elle touche à quelque chose de fort, de précieux. Toucher à la condition de mère, c’est toucher à l’amour, à l’intime.
Si l’on s’interroge rarement, en tout ça pas au point de se flageller, pour savoir si l’on est un bon collègue ou un bon membre de club de sport, on passe notre vie à s’interroger sur notre condition de mère. Est-ce que je suis une bonne mère !? Oh on Dieu, j’ai crié sur mes mômes, quelle mère en carton !
Et vas y que l’on se met dans des cases, voire que l’on y met allègrement sa voisine au prétexte qu’elle ne fait pas comme nous.
Qui n’a jamais senti posé sur elle un regard jugeant devant son impuissance à calmer son enfant dans un lieu public ? Rien que laisser ou pas remonter le toboggan à l’envers à à un enfant de 4 ans peut déclencher un tsunami de jugements dans la communauté des mamans.
Mère parfaite versus mère en carton.
Face à cette surexposition au jugement, les mères finissent elles-mêmes par s’auto juger, par ranger systématiquement chacune de leurs actions dans la case de la « bonne maman » ou dans celle de la « mère en carton« .
Avec plus ou moins d’auto-dérision, voilà qu’il est devenu courant voire normal d’entendre une mère se dénigrer sur la façon dont elle agi avec ses mômes.
« Je sais c’est pas bien hein, mais hier j’étais crevée je les ai collés devant un dessin animé ». « Ohlala j’ai encore hurlé pour qu’ils s’habillent ce matin, dans le genre mère pourrie pour commencer la journée »…
Arrêtez ça. Arrêtez de vous justifier par le jugment.
J’ai toujours été dérangée, tant par celles qui s’estampillent super maman ultra bienveillante je communique que par la CNV tu devrais faire l’école à la maison j’achète que du bio et je fais tous mes goûters maison, que par celles qui affichent leur fails en riant genre « j’suis une mère libérée je fais de la merde mais je m’en fous ».
Et pourtant, je l’ai fait, je le fais même encore parfois. J’ai même eu une rubrique « bad mother » sur ce blog.
Mais rien ne va dans tout ça. C’est quoi une super maman ou une mère en carton ? C’est quoi le règlement à respecter pour avoir tout bon, 20/20 en éducation ? Qui édicte le barème du bon parent ?
Ce qui me dérange, c’est que finalement, tout ça, c’est du jugement.
Jugement de l’autre mais surtout, jugement de soi avant tout. Derrière lequel se cache à demi mots une certaine forme de culpabilité, voire un besoin d’être reconnu(e) ou encore rassuré(e).
La vérité c’est que chacun(e) cherche à faire pour le mieux avec son ou ses enfants.
Elle fait avec sa construction à elle, son système de valeurs à elle, son propre héritage, sa vision personnelle de la parentalité, de ce qu’elle souhaite ou non transmettre à ses enfants.
Si nous devons, en tant que parent, porter une réflexion, c’est uniquement sur la base de nos valeurs à nous.
Par sur des paramètres sociétaux hasardeux aussi variés qu’il existe d’humains. Chacun d’entre nous a sa propre vision de ce qu’est un « bon parent », une « bonne éducation », de la façon idéale d’accompagner un enfant dans ses apprentissages et dans sa construction.
Chez moi on mange à table par exemple. Je ne conçois pas que l’on puisse faire un plateau télé sur le canapé. C’est MA façon de fonctionner, en accord avec mon système éducatif et des valeurs qui me sont propres et personnelles.
Pour certains je serais trop stricte et pas drôle, je priverais mes enfants de moments funs au prétexte de règles à la con. D’autres partageront mon fonctionnement et salueront le fait que je donne un cadre à mes enfants.
Et vous savez quoi ? Ce que chacun pense, on s’en fout.
Ce qui compte, c’est que ce fonctionnement colle à ma vision des choses, à celle de notre famille, au « code » plus ou moins tacite qui nous unit. Peu importe qu’il soit approuvé, compris, voire décrié ou jugé par d’autres parents.
Je n’en serais même pas touchée pour tout vous dire, parce que j’agis en conscience, je sais pourquoi j’agis ainsi. Je ne le fais pas pour répondre à un attendu de la société (qui pourrait être ici « les parents trop laxistes font des enfants rois« ), je le fais pour des raisons qui répondent à mon attendu à moi – et à celui de mon conjoint dont je parle peu ici parce que je trouve que globalement ces automutilations sur la parentalité sont assez féminines, mais il est évident que dans l’idéal, le couple parental est en accord sur ce genre de sujets évidemment -.
Je peux tout à fait aller chez des amis qui font pizza canapé télé tous les vendredis avec leurs enfants. Je ne les jugerai pas. Ils sont chez eux, ce sont leurs enfants, ils font bien ce qu’ils veulent et je ne les en aimerai pas moins.
Et à l’extérieur alors !?
Je sais, pour beaucoup fréquenter les réseaux sociaux, que c’est souvent ce qui pose question.
Quid du comportement de l’enfant en société, au cinéma, au restaurant ou dans les transports en commun ?
Et bien, il en va des enfants comme des adultes, je vous dirai. Il y a des codes sociaux à respecter un peu partout, plus ou moins tacites, que nous connaissons ou respectons (ou pas d’ailleurs) tout à fait consciemment.
Dès l’instant où il n’est plus chez lui, il appartient au parent de demander à son enfant de s’adapter au code propre à l’endroit où il est. A l’évidence, ce n’est pas parce qu’on accepte chez soi que notre môme saute sur le canapé qu’il peut se mettre debout avec ses pompes crado sur le siège du train.
Il s’agit ici je trouve, bien plus de bienséance et de savoir-vivre que d’éducation, qui sont des sujets qui s’imbriquent mais restent totalement différents.

Bon ou mauvais parents : aux yeux de qui, au nom de quoi ?
Pour en revenir au fait d’être (ou de se sentir plutôt) un bon ou un mauvais parent, à toutes ces ruminations de l’esprit liées à ces sujets là, je voulais juste partager cette réflexion qui, pour ma part, a changé mon regard sur ma parentalité.
A chaque fois que je doute, que j’ai cette tendance à me dire « ohlala sur ce coup je suis vraiment une mère bidon », je poursuis ma réflexion par un « oui mais, aux yeux de qui ? ».
Est-ce que donner un goûter industriel à mes mômes, ça me heurte moi personnellement, est ce que c’est en contradiction avec le parent que je veux être pour mes enfants ? Ou est-ce que ça irrite juste l’image, la représentation que la société me renvoie de ce que devrait être un bon parent ?
Parents, croyez-en vous.
Si c’est moi que ça heurte, si c’est à mes yeux que donner une compote industrielle renvoie une image de « mère en carton » (perfectible me conviendrait davantage d’ailleurs), alors, OK, il faut que je voie comment faire évoluer ça.
Si c’est « juste » une question de tendance amenée par la société et qu’en tant que personne, je vis très bien la Pom’ Potes du goûter… Alors restons à la Pom’ Potes du goûter. Qui ne fait nullement de moi une mauvaise maman.

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