Il suffit parfois de presque rien. Quelques mots, un petit mail, et l’on retourne plusieurs années en arrière en une fraction de secondes.
Assez souvent, avec les articles publiés parfois il y a bien longtemps, je reçois des mots. Certains courts, d’autres longs, des retours d’expérience, des remerciements. Je suis chaque fois très touchée, émue même de me dire que ces personnes qui ne me connaissent même pas en vrai ont pu prendre du temps pour m’écrire, me faire suffisamment confiance pour partager un peu de leur expérience, de leur douleur, de leur intimité.
Chaque fois je mets des lustres à répondre, parce que je suis comme ça. Quand un message me touche, j’aimerais le garder tout neuf à jamais.
Ce matin, c’était un mail suite à cet article de 2014, l’un des plus importants que j’ai pu publier à n’en pas douter.
Celui sur cette grossesse surprise, cette coquine petite fille qui s’est invitée.
C’était il y a 5 ans déjà, cette aventure. Elle me semble déjà si loin mais pourtant, elle fait et fera à jamais partie de moi.
Forcément, ce matin je m’y suis replongée. Et j’ai senti à nouveau la puissance de chaque mot, la force de chaque émotion. Je me suis souvenue de ces instants tourmentés, partagés entre la peur, l’envie, l’angoisse, le doute, le regret, la certitude, l’incertitude, la douleur, la culpabilité. Le tourbillon des sentiments, la lenteur de ces journées, et puis la délivrance, la révélation, cet instant où après tout, enfin tu sais que tu sais.
C’était il y a 5 ans, c’était hier, c’était une éternité.
Et maintenant ? Et après 5 années ?
Bien sûr je n’ai jamais regretté. J’ai poursuivi cette grossesse avec son lot de petites frayeurs et de doux instants, j’ai accueilli cette petite fille qui de 4 nous a fait passer à 5, et depuis 4 ans et un tiers maintenant, nous vivons une aventure qui n’aurait assurément pas eu la même saveur si elle n’avait pas été là.
A l’époque, j’ai eu peur. Tellement.
Peur de l’imprévu. Peur de tout bousculer. De ne pas y arriver. De ne pas savoir gérer. De ne pas savoir l’aimer. De ne pas avoir le temps, ni l’énergie. Peur que 3, ce soit trop. Que les grands ne s’y fassent pas.
J’avais peur. De tout ça.
Parce que 2 c’est déjà bien. Pour leur avenir. Pour mini qui est tout petit. Parce qu’il faudra payer les études et l’appart’ étudiant un jour. Parce que je suis épanouie dans mon boulot, que je veux évoluer, et surtout pas m’arrêter. Parce qu’ils s’entendent déjà pas top tous les 2 alors avec un 3ème… Parce que ça va chambouler toute notre vie. Parce que j’avais envie de partir en voyage en avril 2014. Enfin voilà, c’était pas possible quoi, juste pas possible.
Et puis 4 ans.
Et tout va bien. Tout va pour le mieux.
Cette petite fille a de la ressource, de la vie, de l’énergie. Elle est belle comme un cœur, elle est douce, espiègle et rigolote. Elle ne ressemble à personne, c’est mon originale, ma petite pépite de vie.
Ses aînés ne se sont jamais aussi bien entendu que depuis qu’elle est arrivée. Et, 3, ça fonctionne très bien. Quand on se dispute avec l’un des 3, il en reste tout de même un autre pour jouer.
Les études, c’est dans quelques années, il est temps d’y penser dès aujourd’hui. En anticipant un peu, il n’y a pas de raison que ça ne le fasse pas. De ce côté, je reconnais que l’on jouait un peu la facilité. Notre appart’ était déjà assez grand et nous avions déjà un monospace pouvant accueillir 3 sièges-auto. J’avais peur quand même, ceci dit. Mais en fait tout va bien.
On n’a pas recommencé à voyager. Mais on a encore toute la vie devant nous pour ça. Et au lieu de ça, on a investi dans un grand chez nous.
Mon job a survécu aussi. Non sans encombres certes, j’ai du quitter un poste génial mais trop éloigné de la maison avec 3 enfants pour un poste pourri à côté de chez moi. Et puis on a redistribué les cartes, on a tout envoyé valser et revu les priorités. J’ai mis mon activité entre parenthèses quelques temps, goûté à autre chose. J’ai énormément appris, et beaucoup grandi de ce côté.
J’ai profité de mes enfants et aujourd’hui, je suis de nouveau à l’équilibre, et en prime dans une région qui nous correspond.
Elle a changé la donne, cette troisième enfant. Assurément.
Elle nous a appris à voir la vie autrement. Peut-être un peu forcés à nous poser. Elle nous a surpris. Charmés.
Les peurs, c’était l’inconnu. L’imprévu.
Je suis plus que sûre aujourd’hui d’avoir fait le bon choix. Sans ça, je ne sais pas si j’aurais « osé », avoir trois enfants. L’envie du petit troisième aurait sûrement fait frétiller mon utérus, mais je ne suis pas sûre que j’aurais su l’écouter. Je sais désormais à côté de quoi je serais passée si la Micro-Fille ne s’était pas incrustée.
C’est sûrement facile, de dire ça après coup. Peut-être, peut-être pas. Je ne sais pas ce qu’aurait été ma vie si mon choix avait été différent, je ne le saurais jamais et je ne voudrais pas le savoir même si l’on m’en donnait l’occasion.
Je ne vis pas chez les Bisounours, rassurez-vous. 3 mômes, ça vous met quand même l’appart’ sacrément en bordel et les nerfs à fleur de peau.
Ce que je veux dire par là, c’est que, loin de toute la douleur, toute l’angoisse, toutes les larmes au début de tout ça, il n’y a finalement plus que du bon. Une enfant qui croque la vie, des parents qui en sont gaga, une fratrie de plus en plus unie.
Bien sûr, j’ai longtemps eu la crainte que ce rejet initial, que ces doutes qui m’ont hantée aient un impact sur mon enfant et sur notre relation. S’il en est un, il n’est que positif. Il me permet de mesurer chaque jour le côté si précieux de ce petit trésor qu’est cette petite fille de 4 ans.

Même que la photo est pourrie, et même qu’on s’en fout.
Il y a entre elle et moi ce lien fort, cette complicité assez dingue, cet amour mère fille qui est assurément, bien plus fort que tout.
Le ou la petit(e) troisième c’est celui qui aurait pu ne pas être et du coup d’autant plus la cerise sur le gâteau. Je n’imagine pas non plus la vie sans Tiny, cette sacrée petite bonne femme (le troiz a aussi une sacrée personnalité !). 3 c’est sûr que c’est un sacré bordel. Les enfants sont en sur-nombre par rapport aux parents. Mais j’crois bien que le bonheur est dans le bordel. En tout cas chez vous comme chez nous ;)