C’est la fin d’une ère. Une page qui se tourne.
Depuis toujours, c’est sur ces mots que je le retrouve le soir après la journée.
« Alors, comment il va l’amour de ma viiiiiie !!!??? »
On est tous pareils, nous, les parents. Faut toujours qu’on trouve des surnoms farfelus à donner à nos enfants.
Mon amour. Mon bébé. Mon ours. Mon lapin. Mon chat. Zouzou. Lalou. L’amoureeeedemaviiiiiie.
Des mots d’amour, des noms d’animaux, des surnoms chelou qui sortent d’on ne sait où.
C’est mignon, je trouve, moi.
Lui aussi, jusqu’ici, il trouvait. Et puis, l’autre soir, discrètement, il est venu me taper sur l’épaule, vingt minutes après que je l’aie couché.
« Maman, tu sais, je préférerais que tu m’appelles plus « mon amour » devant les copains ».
J’ai cru m’étouffer, je l’ai fait répéter.
Il a répété.
« Je préférerais que tu m’appelles plus mon amour devant les copains ».
« Mais… Pourquoi mon chéri ? »
« Bha… Chais pas » dit-il en posant sa tête sur mon épaule. « Que à la maison ».
« Bon, bha je t’appellerais mon coeur alors », je lui ai dit en riant.
« Ah non, pas ça non plus ».
« Bha… Comment je t’appelle alors ? »
« Tu peux m’appeler mon Loulou, mais c’est tout ».
Bon. Bha voilà. Nous y sommes les amis.
Il a grandi mon petit garçon. Il n’est plus un bébé.
Il exprime sa pudeur, son besoin d’intimité.
Il tient encore à ses câlins du soir et du matin, il aime toujours être porté, il me gratifie toujours de ses « je t’aime jusqu’à la lune jusqu’aux étoiles jusqu’au ciel » avant d’aller au lit. Il réclame toujours ses bisous dans le cou. Il me tient toujours la main dans les magasins. Mais il préfère désormais que nos échanges tendres soient discrets. Loin des regards des copains.
Ca file, malgré tout. 6 ans et demi, et demain le CP.
Après demain, le panneau sens interdit sur la porte de la chambre.
Le mois prochain, les « tu peux me laisser à l’angle de la rue, c’est pas la peine de m’accompagner à la grille ».
Tout bientôt, les « rho arrête de m’embrasser devant les copains ».
L’enfance passe, les petites ailes se déploient peu à peu.
Est-ce que la maman que je suis a pris une petite claque lorsque l’enfant plus vraiment petit a prononcé ces quelques mots ? Assurément.
Est-ce qu’elle a souri ? Bien entendu.
La maman est tendrement amusée de voir ce petit gars encore accroché à son doudou et à son biberon du matin débuter malgré tout sa première échappée.
La maman est touchée. Elle se surprend à imaginer dans ce petit bonhomme plus vraiment l’esquisse de l’adulte qu’il sera demain.
Sa tendresse, sa délicatesse, sa discrétion et sa fermeté aussi.
Alors ne t’inquiète pas, mon amour. C’est avec un petit pincement au cœur mais avec le sourire aussi que je réserverai les grands mots pour nos instants d’intimité.
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